Résumé de l'article

Matthieu Béra, Critique interdite/Critique autorisée
Le droit de la critique en matière artistique, plutôt méconnu, dépend de la loi sur la presse qui régit les questions de diffamation et droit de réponse et de l’article 1382 du code civil concernant la faute. Concrètement, ces éléments interdisent à la critique d’art toute incur-sion dans le domaine économique, qui risquerait d’atteindre la considération professionnelle, et par là, afficherait une volonté de nuire. Ce droit concerne les biens « culturels » qu’il contribue à spécifier. Tous les autres biens sont soumis au droit commun de la publicité (mensongère, comparative) qui repose sur la notion de dénigrement et qui dépend du droit de la concurrence déloyale, ainsi que du droit des marques. Dans ce cadre légal très strict, il est inter-dit de critiquer les produits des concurrents, surtout si les critères d’évaluation sont subjectifs. Cette régulation juridique constitue donc le symétrique exact de la délimitation de l’acceptable dans le domaine de la critique culturelle, qui ne doit pas être fondée sur autre chose que des opinions.
Cet article cherche à démontrer que le droit incite à considérer très différemment les biens, en les traitant tantôt comme des biens criticables (subjectivement), tantôt comme des biens non criticables. De ce traitement différentiel découle en grande partie la qualification des biens et leurs domaines de définition, culturel ou industriel.


Mots-clef : critique,biens culturels, biens industriels
t. 48, 2004 : p. 413-437