Résumé de l'article

Florence Burgat, La cohérence substantielle du droit animalier est-elle en péril ? Pistes de recherche sur l’épistémologie sous-jacente du droit animalier
Le droit animalier, c’est-à-dire l’ensemble des législations relatives aux animaux, présente aujourd’hui des contradictions internes suffisamment fortes pour mettre en péril sa cohérence, annonçant peut-être ainsi sa souhaitable refonte. Certes, le droit n’a pas vocation à construire une ontologie systématique et fondée, mais c’est l’illégitimité même de ce qu’il réglemente qui se profile en son sein, comme nous nous proposons de le mettre en évidence. En effet, certaines déterminations concernant les animaux dans les réglementations posent qu’ils sont non seulement sujets à la « douleur », mais encore à la « souffrance », à l'« angoisse » et à la « détresse », indiquant par là une vie psycho-physique intense vécue en première per-sonne, dont la dimension existentielle ne peut échapper au lecteur ; des principes moraux et des injonctions sont par ailleurs posés, tels que le respect de la « valeur intrinsèque de l’animal » et celui de son « bien-être » au sein même des textes qui légalisent et organisent des activités qui en tant que telles bafouent fondamentalement et massivement ce qui vient d’être reconnu aux animaux. Il en résulte un état de double contrainte. Le droit animalier saura-t-il prendre la pleine mesure de ce que les sciences de l’esprit et les approches phénoménologiques disent des animaux, fût-ce au prix d’un bouleversement de l’ordre juridique qui sanctionnerait une autre donne anthropologique où les animaux seraient entrés dans la communauté des égaux ?

Mots-clef : droit animalier, animaux, violence, sensibilité, vécu de conscience, épistémologie juridique
tome 55, 2012: p.247-268