Résumé de l'article

Ioannis S. Papadopoulos, La philosophie pénale entre utilité sociale et morale rétributive
Une étude de droit comparé montre qu'aucune des deux tendances dominantes dans la philosophie pénale américaine n'a réussi à pénétrer dans la culture juridique continentale, essentiellement pour des raisons philosophiques et constitutionnelles. L'utilitarisme pénal et son avatar le mouvement "Droit et économie ", qui utilisent le raisonnement économique en droit, imprègnent la philosophie pénale anglo-américaine mais sont rejetés par la philosophie continentale, comme cela apparaît de deux exemples juridiques : le cas du " mauvais samaritain " - autrement dit de la non-assistance à personne en péril - et celui des diffamations et injures racistes. Le rétributivisme, une approche de la peine fondée exclusivement sur la morale déontologique, est de plus en plus prégnant aux États-Unis mais ne réussit pas à faire une percée dans le paysage juridique européen. En réalité, aucune philosophie pénale ne peut justifier toute seule un système de règles privatives de liberté : l'utilitarisme, malgré ses vertus libérales indéniables mais longtemps occultées en philosophie du droit continentale, peut aboutir à des situations moralement inacceptables , le rétributivisme, malgré son bon sens apparent, crée en pratique plus de problèmes qu'il n'en résout. L'article propose un modèle de mélange de politiques pénales proche des pratiques pénales européennes, dans lequel la théorie de la réhabilitation sociale du délinquant tient une place centrale, mais pas exclusive des autres théories de la peine.

Mots-clef : droit comparé, utilitarisme, pénal
t. 45, 2001 : p. 159-175